Le Nutri-Score et l’alimentation des sportifs

Aujourd’hui, il est devenu courant de voir des aliments arborer un logo coloré allant de A (vert) à E (rouge) : c’est le Nutri-Score, un système conçu pour guider les consommateurs vers des choix alimentaires plus sains en un coup d’œil. Conçu pour le grand public, ce système simplifie la lecture des étiquettes en mettant en avant les produits les plus équilibrés sur le plan nutritionnel.

Mais qu’en est-il pour les sportifs, dont les besoins diffèrent parfois de ceux de la population générale ? Entre apports caloriques élevés, protéines essentielles et glucides nécessaires à l’endurance, les critères d’une alimentation adaptée à la performance sont bien spécifiques. Certains aliments clés dans l’alimentation des athlètes — comme les oléagineux ou les boissons énergétiques — peuvent être mal notés par le Nutri-Score, alors qu’ils jouent un rôle majeur dans la récupération ou l’effort.

Le Nutri-Score est-il donc un bon outil pour les sportifs, ou un indicateur trompeur ? Faut-il s’y fier, l’ignorer, ou l’utiliser différemment ? Cet article vous aide à y voir plus clair en expliquant le fonctionnement du Nutri-Score, ses avantages, ses limites pour les athlètes, et comment l’interpréter intelligemment dans un cadre sportif.

 

1.  Qu’est-ce que le Nutri-Score?

Le Nutri-Score est un système d’étiquetage nutritionnel simplifié, conçu pour guider les consommateurs dans leurs choix alimentaires. Il attribue à chaque produit une note de A (vert) à E (rouge) selon sa qualité nutritionnelle.

✅ Comment fonctionne le Nutri-Score ?

Il se présente sous la forme :

• D’un logo à 5 couleurs (du vert au rouge)
• Avec 5 lettres (de A à E)

Lettre	Couleur	Signification
A	🟢 Vert foncé	Très bonne qualité nutritionnelle
B	🟢 Vert clair	Bonne qualité
C	🟡 Jaune	Qualité moyenne
D	🟠 Orange	Mauvaise qualité
E	🔴 Rouge	Très mauvaise qualité

Le Nutri-Score est basé sur une évaluation des éléments positifs et négatifs de la composition d’un aliment pour 100 grammes.

✅ Points positifs (bonus) :

• Fibres alimentaires : Bonnes pour la digestion.
• Protéines : Essentielles à la construction musculaire.
• Fruits, légumes, légumineuses, fruits à coque : Riches en vitamines, minéraux et antioxydants.

 

⚠️ Points négatifs (malus) :

• Énergie (calories) : L’excès favorise le surpoids.
• Sucres : Risque de diabète et caries.
• Graisses saturées : Liées aux maladies cardiovasculaires.
• Sel : Responsable de l’hypertension.

🧮 Formule de calcul du Nutri-Score :

• Score final = Points négatifs – Points positifs
• Plus le score est bas, meilleure est la note (A).
• Plus il est haut, plus la note est mauvaise (E).

Le score est établi selon une évaluation des :

• Éléments négatifs : Calories, sucres, graisses saturées, sel
• Éléments positifs : Fibres, protéines, fruits, légumes, légumineuses, oléagineux

 

Objectifs principaux du Nutri-Score :

• Améliorer la compréhension des valeurs nutritionnelles
• Lutter contre les maladies chroniques (obésité, diabète, maladies cardiovasculaires)

 

2. Histoire et Création du Nutri-Score : Qui est à l’origine ?

Le Nutri-Score a été conçu par le professeur Serge Hercberg, épidémiologiste et nutritionniste français, dans le cadre de ses travaux sur la prévention des maladies chroniques.

Évolution du Nutri-Score :

• 2014 : Proposition du Nutri-Score par Serge Hercberg au ministère de la Santé
• 2017 : Adoption officielle en France (étiquetage volontaire)
• 2018-2022 : Adoption dans plusieurs pays européens : Belgique, Allemagne, Espagne, Pays-Bas
• 2023 : Discussions sur son harmonisation à l’échelle de l’Union Européenne

 

 3. Validité scientifique du Nutri-Score : Que disent les études ?

 3.1. Études de cohorte EPIC : Des preuves solides sur plus de 500 000 participants

• Étude PLOS Medicine (2018) : Risque de cancer

  • Suivi : 15 ans
  • Participants : 500 000 personnes
  • Résultat : Consommer des aliments mal notés (D ou E) augmente de 7 % le risque de cancers (côlon, rectum, foie, sein post-ménopause).

• Étude British Medical Journal (2020) : Risque de mortalité

  • Suivi : 17 ans
  • Décès observés : 53 112
  • Résultat : Une alimentation basée sur des produits mal notés par le Nutri-Score accroît la mortalité, notamment due aux cancers et maladies cardiovasculaires.

Ces études confirment les résultats des recherches françaises (SU.VI.MAX, NutriNet-Santé) et internationales (Whitehall II, EPIC-Norfolk, SUN).

3.2. Impact sur la mortalité : Une baisse significative

Une étude de modélisation (Journal of Public Health, 2021) montre qu’une généralisation du Nutri-Score pourrait réduire la mortalité par maladies chroniques de 3,4 %, notamment dans les catégories socio-économiques défavorisées.

 

 4. Adoption et déploiement du Nutri-Score en Europe : Où en est-on ?

🇫🇷 4.1. Situation en France : Progrès et réticences

• En 2024 :
  
  • 520 entreprises et 690 marques ont adopté le Nutri-Score
  • 30 à 35 % de l’offre alimentaire porte l’étiquette
  • Soutien de grandes marques (Danone, Nestlé), mais refus de Ferrero, Coca-Cola, Mondelez

🇪🇺 4.2. Déploiement européen et harmonisation

Le Nutri-Score est déjà adopté dans plusieurs pays : Belgique, Allemagne, Espagne, Pays-Bas, Luxembourg, Suisse.
La Commission Européenne envisage de rendre le Nutri-Score obligatoire dans le cadre de sa stratégie Farm to Fork.

Une étude (Journal of Nutritional Science, 2022) dans 12 pays européens démontre que :

• Le Nutri-Score est le système le mieux compris des consommateurs.
• Il aide efficacement à classer la qualité nutritionnelle des produits.

 

 5. Perception des consommateurs face au Nutri-Score

 5.1. Étude Santé publique France (2019) : Une forte adhésion

• 81 % des Français connaissent le Nutri-Score
• 92 % trouvent l’étiquette claire et compréhensible
• 90 % soutiennent son caractère obligatoire
• 50 % déclarent changer leurs achats grâce au Nutri-Score (+32 points depuis 2018)

 5.2. Impact réel sur les comportements alimentaires

Le Nutri-Score :

•  Oriente vers des produits plus sains (moins de sucre, de sel et de graisses saturées)
•  Influence positivement les populations à faible revenu
•  Contribue à réduire la consommation d’aliments ultra-transformés

 

6. Défis et résistances face au Nutri-Score

6.1. Pressions des lobbys industriels

• Des groupes comme Ferrero, Coca-Cola et Mars s’opposent au Nutri-Score, craignant une chute de leurs ventes.
• En 2021, une campagne de lobbying a accusé les chercheurs de partialité, provoquant une controverse.

6.2. Blocages dans la régulation des publicités alimentaires

Les industriels freinent l’intégration du Nutri-Score dans la publicité destinée aux enfants, malgré le soutien de :

• Santé publique France
• Le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP)
• La Cour des comptes

 

 7. Nutri-Score et alimentation des sportifs : Une adaptation nécessaire ?

 7.1. Les besoins nutritionnels spécifiques des sportifs

Les sportifs ont des besoins particuliers :

• Apport énergétique élevé (calories, glucides)
• Protéines (récupération et construction musculaire)
• Bonnes graisses (oméga-3, acides gras insaturés)
• Hydratation et électrolytes (éviter les crampes)

 

 8. Avantages du Nutri-Score pour les sportifs

• ✅ Clarté immédiate : Lecture rapide pour éviter les pièges (excès de sucre, sel, graisses saturées)

• ✅ Sensibilisation : Identification facile des aliments riches en protéines, fibres et vitamines
• ✅ Hors entraînement : Maintien d’une alimentation équilibrée en phase de récupération

 

 9. Limites du Nutri-Score pour les sportifs

• ❌ Besoins énergétiques mal évalués : Les noix, riches en bonnes calories, sont mal notées (C ou D) malgré leur utilité.
• ❌ Sous-valorisation des protéines : Indispensables aux sportifs, mais peu pondérées dans le calcul du score.
• ❌ Ignorance du contexte sportif : Les boissons sucrées (D ou E) sont essentielles juste après l’effort.
• ❌ Pas d’adaptation par discipline : Un marathonien et un haltérophile n’ont pas les mêmes besoins.

 

 10. Exemples concrets d’aliments notés par le Nutri-Score pour les sportifs

Aliment	Nutri-Score	Utilité pour les sportifs
Amandes, noix (oléagineux)	C ou D	Source d’énergie durable
Yaourt grec (protéines)	A ou B	Idéal pour la récupération
Boisson isotonique	D ou E	Essentielle après un effort intense
Pâtes complètes	A ou B	Source principale de glucides

 

11. Conseils pratiques pour les sportifs utilisant le Nutri-Score

• 🟠 Ne pas se fier uniquement à la note globale : Observer la composition complète (protéines, glucides, lipides).
• 🟠 Adapter les choix selon le moment :
  
  • Avant l’effort : Glucides complexes (pâtes, flocons d’avoine)
  • Pendant l’effort : Glucides rapides (barres énergétiques, boissons isotoniques)
  • Après l’effort : Protéines et glucides (yaourt, fruits, amandes)
• 🟠 Consulter un nutritionniste sportif pour des conseils personnalisés.

 

En résumé : Le Nutri-Score, un allié utile mais pas infaillible

Le Nutri-Score est une boussole précieuse pour mieux manger, mais il faut savoir l’utiliser avec discernement, en le combinant à la lecture des étiquettes et au bon sens alimentaire.

Vers un Nutri-Score spécifique pour les sportifs ?

Des chercheurs proposent :

•  Intégrer un indice protéique spécifique
•  Différencier les glucides simples et complexes selon l’usage sportif
• Valoriser les bonnes graisses bénéfiques à l’endurance
•  Créer un Nutri-Score « Sport », adapté aux besoins énergétiques des athlètes