jemeremetsausport.com

Incontinence urinaire chez les sportives: comprendre et agir

Incontinence urinaire

Longtemps considérée comme un sujet tabou, l’incontinence urinaire d’effort concerne de nombreuses femmes sportives, y compris jeunes et actives. Pression abdominale, déséquilibre musculaire, manque de prévention : les causes sont multiples, mais des solutions existent. Entre exercices de Kegel, rééducation du périnée et adaptation de l’activité physique, la prise en charge s’appuie aujourd’hui sur des méthodes efficaces, alliant santé, performance et qualité de vie.

L’incontinence urinaire chez les sportives est un phénomène fréquent, mais encore trop souvent passé sous silence. Longtemps associée à l’âge ou à la maternité, elle touche aussi les femmes jeunes, actives et même celles engagées dans le sport de haut niveau. En réalité, jusqu’à 80 % des athlètes féminines déclarent avoir déjà ressenti des fuites urinaires à l’effort.

Ce trouble, appelé incontinence urinaire d’effort (IUE), se manifeste par de petites pertes d’urine lors d’un effort physique (course, saut, abdominaux ou entraînement intense)en raison d’un affaiblissement des muscles du plancher pelvien. S’il reste souvent perçu comme un simple désagrément, il peut impacter la confiance, la performance et la qualité de vie des sportives.

Pourtant, la science et la pratique clinique convergent : l’IUE n’est ni une fatalité ni un frein à la performance. Les exercices de Kegel, la rééducation périnéale, une activité physique adaptée et une meilleure connaissance du corps permettent de prévenir et de traiter efficacement ce trouble.

Cet article explore les mécanismes physiologiques de l’incontinence urinaire d’effort, ses facteurs de risque, les sports les plus concernés et les solutions thérapeutiques validées: de la prévention à la rééducation, jusqu’aux traitements médicaux ou chirurgicaux. Un dossier complet pour comprendre, agir et permettre à chaque sportive de continuer à s’épanouir dans son sport, sans gêne ni tabou.

 

1. Comprendre l’incontinence urinaire

Selon l’International Continence Society, l’incontinence urinaire est une perte involontaire d’urine. Elle peut prendre plusieurs formes :

  • Incontinence urinaire d’effort (IUE) : liée à une pression abdominale élevée lors d’un effort ou d’une toux.

  • Incontinence par urgenturie : envie pressante et incontrôlable, souvent aggravée par le stress ou le froid.

  • Incontinence mixte : associe les deux mécanismes.

 

2. Le rôle du périnée

Le périnée, ou plancher pelvien, est un ensemble de muscles et de tissus soutenant la vessie, l’utérus et le rectum. Il assure la continence urinaire et anale, stabilise le bassin et contribue à la fonction sexuelle.

Il se compose de trois couches musculaires :

  • le plan superficiel, impliqué dans la continence anale et la sexualité ;

  • le plan moyen, qui soutient les organes pelviens ;

  • le plan profond, essentiel pour la prévention et la rééducation périnéale.

Une bonne coordination entre ces structures et la sangle abdominale est indispensable pour éviter les fuites urinaires à l’effort.

 

3. Pourquoi le sport peut favoriser l’incontinence

3.1. Une pression abdominale excessive

Pendant l’exercice, la pression dans la cavité abdomino-pelvienne augmente. Si le plancher pelvien ne s’active pas correctement, la vessie subit une poussée vers le bas. L’activité physique ne renforce donc pas toujours ce plancher ; au contraire, elle peut le fragiliser lorsqu’elle est mal encadrée.

Des études montrent que, chez les sportives atteintes d’IUE, l’activation périnéale est retardée : le soutien de la vessie arrive trop tard pour contenir la pression.

LIRE AUSSI  Le cyclisme

3.2. Un déséquilibre musculaire

L’incontinence résulte souvent d’un déséquilibre entre la force abdominale et la tonicité du périnée. Les abdominaux, trop puissants ou contractés sans coordination, accentuent la pression vers le bas, surtout dans les sports à impact élevé.

 

4. Les sports les plus à risque

Les sports à risque d’incontinence urinaire d’effort sont surtout ceux qui génèrent de fortes accélérations, sauts/atterrissages répétés ou pics de pression abdominale : trampoline et gymnastique (prévalences rapportées très élevées, souvent >60–80 %), volley-ball, handball, sports de saut/corde à sauter, et de manière générale la course et les sports collectifs intensifs. Plus la pratique est intensive (volume, niveau compétitif), plus le risque augmente. Les sports de levage lourd (haltérophilie, powerlifting, CrossFit) exposent aussi une part notable d’athlètes, probablement via la combinaison charges élevées + retenue de souffle (Valsalva). À l’inverse, les activités à faible impact (natation, vélo, marche, renforcement doux, yoga) sont moins “fuyantes”. Pour situer : une méta-analyse récente chez les sportives retrouve ~26 % d’incontinence globale (dont ~21 % d’effort), avec des pics dans les sports à fort impact comme trampolining/volley ; des études spécifiques confirment des taux très hauts au trampoline et une association au niveau de pratique en handball ; chez les athlètes de force, des travaux montrent des prévalences significatives et un lien avec des séances lourdes/compétitions.

Les taux de prévalence de l’IUE diffèrent selon les disciplines :

Discipline Prévalence estimée
Trampoline 80 %
CrossFit 81 %
Athlétisme 74 %
Basketball 68 %
Judo / Aviron / Escrime 25 %
Natation 20 %

Les sports à impact élevé ou impliquant des sauts, des réceptions ou des accélérations répétées sollicitent fortement le périnée.
Les sports à faible impact, comme la natation ou la marche rapide, le préservent davantage.

Les facteurs de risque incluent également le nombre d’accouchements, une sangle abdominale hypertonique, une hyperactivité vésicale, un IMC élevé ou une mauvaise posture.

 

5. Lien entre incontinence et maternité

Une sportive ayant souffert d’IUE avant une grossesse est plus susceptible d’en présenter après. L’activité physique adaptée ne majore pas ce risque, mais la rééducation du périnée reste essentielle, surtout après l’accouchement.

 

6. Un tabou encore bien présent

Une enquête menée à l’INSEP a montré que seules 22 % des sportives admettent souffrir d’incontinence, alors que près de la moitié présentent des symptômes.

Les raisons du silence :

  • perception erronée de l’IUE comme “normale” dans le sport,

  • gêne à en parler,

  • manque de sensibilisation des médecins du sport et entraîneurs.

Certaines sportives adoptent des stratégies inadaptées :

  • réduction de l’hydratation,

  • multiplication des passages aux toilettes,

  • utilisation de protections hygiéniques non adaptées,

  • voire abandon du sport.

Ces mesures ne traitent pas la cause et peuvent aggraver les troubles.

 

7. Comment gérer les fuites urinaires pendant le sport ?

La gestion repose sur une approche globale :

  • Vidanger la vessie avant l’entraînement pour réduire la pression.

  • Porter des vêtements adaptés : leggings techniques et respirants, qui maintiennent sans comprimer.

  • Utiliser une protection urinaire adaptée aux efforts physiques (spécifiques au sport).

  • Pratiquer régulièrement les exercices de Kegel et de gainage hypopressif pour renforcer le plancher pelvien.

  • Si besoin, consulter un professionnel pour une rééducation personnalisée.

L’objectif n’est pas de masquer les symptômes, mais de reprendre confiance et de maintenir une pratique sportive sereine.

LIRE AUSSI  Sport en Famille : Des moments de partage inoubliables

 

8. Prévenir l’incontinence chez les sportives

La prévention passe par une pratique régulière d’exercices adaptés ciblant les muscles du plancher pelvien.

  • Évitez les abdominaux classiques type crunchs au profit du gainage hypopressif.

  • Intégrez les exercices de Kegel dans votre routine.

  • Travaillez la respiration abdominale, essentielle pour réguler la pression interne.

  • En cas de doute, une rééducation du périnée préventive est recommandée, notamment après un accouchement.

 

9. Quels sont les traitements efficaces ?

La prise en charge de l’IUE doit être personnalisée selon la sévérité et les besoins de la patiente.

9.1. Rééducation périnéale

C’est le traitement de première intention. La kinésithérapie ou l’électrostimulation permettent d’améliorer la tonicité et la coordination musculaire.

9.2. Exercices de renforcement

Les exercices de Kegel et les entraînements fonctionnels adaptés renforcent durablement la musculature du plancher pelvien.

9.3. Dispositifs médicaux

Les pessaires ou autres dispositifs internes peuvent être utilisés temporairement pour soutenir la vessie lors de l’effort.

9.4. Chirurgie

En dernier recours, la pose de bandelette sous-urétrale est une solution efficace, réservée aux cas sévères ou persistants.

Chaque approche thérapeutique doit être précédée d’un bilan complet pour adapter la rééducation périnéale à chaque profil sportif.

 

10. Quelles solutions pour améliorer la qualité de vie des sportives ?

L’objectif n’est pas seulement d’éliminer les symptômes, mais d’aider la sportive à retrouver confiance en son corps et en sa pratique.

Conseils clés :

  • suivre un programme de rééducation périnéale personnalisé ;

  • maintenir une activité physique adaptée pour éviter la sédentarité ;

  • demander conseil à un médecin du sport ou à un kinésithérapeute spécialisé ;

  • privilégier un environnement de soutien : clubs, entraîneurs, équipes médicales informées ;

  • choisir des solutions discrètes et confortables (protections sportives, sous-vêtements techniques).

Une bonne information et une prise en charge précoce améliorent significativement la qualité de vie et la performance sportive.

 

Conclusion – Lever le tabou pour progresser sereinement

L’incontinence urinaire d’effort chez les sportives reste une réalité souvent ignorée, alors qu’elle touche jusqu’à 80 % des athlètes de haut niveau. Les facteurs de risque sont multiples — type de sport, nombre d’accouchements, déséquilibre de la sangle abdominale, hyperactivité vésicale — mais des solutions efficaces existent.

La prévention, la rééducation périnéale, les exercices adaptés et une prise en charge globale permettent de pratiquer son sport sans gêne. La chirurgie ou les dispositifs médicaux ne concernent qu’une minorité de cas. Parler de ce sujet, c’est déjà agir.
Intégrer la santé pelvienne dans les programmes d’entraînement, sensibiliser les professionnels du sport et encourager la pratique régulière d’exercices de renforcement sont des étapes essentielles pour garantir la performance, la santé et la qualité de vie de toutes les sportives.

 

FAQ

Quels sont les facteurs de risque ?

Les sports à impact élevé, le nombre d’accouchements, un déséquilibre de la sangle abdominale, une hyperactivité vésicale ou encore la fatigue musculaire du périnée sont les principaux facteurs aggravants.
Une évaluation médicale permet de mieux identifier ces risques et d’adapter la pratique sportive.

Comment gérer les fuites pendant le sport ?

Avant la séance, pensez à vidanger la vessie, porter des vêtements adaptés et, si besoin, utiliser une protection urinaire discrète.
Les exercices de renforcement périnéal et la rééducation du plancher pelvien contribuent à réduire les symptômes sur le long terme.

LIRE AUSSI  Sommeil et sport: La constante interdépendance

Quels traitements sont efficaces ?

La rééducation périnéale demeure la base du traitement.
En complément, des dispositifs médicaux comme les pessaires peuvent être proposés.
Dans les cas plus sévères, une chirurgie par bandelette sous-urétrale peut restaurer efficacement la continence.

Comment améliorer la qualité de vie ?

Une rééducation adaptée, un soutien médical personnalisé et une meilleure information permettent de retrouver confiance.
Des solutions discrètes existent pour maintenir la pratique sportive et préserver la qualité de vie au quotidien.

Vers une meilleure prise en charge de l’IUE chez la sportive

L’incontinence urinaire d’effort (IUE) chez la femme sportive n’est plus un simple sujet tabou : elle s’impose aujourd’hui comme un véritable enjeu de santé publique dans la sphère sportive. Touchant aussi bien les pratiquantes de haut niveau que les sportives régulières, cette perte involontaire d’urine survient lorsque la pression abdominaledépasse la capacité des muscles du plancher pelvien à maintenir la continence urinaire.

Les causes sont multiples : sports à risque, hyperactivité vésicale, nombre d’accouchements, déséquilibre de la sangle abdominale, ou fragilité du tissu collagène. Même les disciplines à faible impact, comme la course à pied ou le fitness, peuvent exposer certaines femmes à des fuites involontaires si le périnée n’est pas suffisamment préparé.

Face à cela, la rééducation périnéale et pelvienne reste le traitement de première intention. Réalisée avec un professionnel de santé(kinésithérapeute ou sage femme) elle permet de restaurer la force et la coordination des muscles du périnée grâce à des exercices de Kegel et d’autres exercices adaptés. La pratique régulière de ces mouvements, associée à un travail de renforcement et à une activité physique bien encadrée, contribue à une récupération durable.

Lorsque la rééducation ne suffit pas, des solutions efficaces existent : dispositifs médicaux (comme les pessaires), protections urinaires sportives discrètes, ou encore la chirurgie par bandelette sous-urétrale, qui restaure la continence dans les cas persistants.

L’essentiel demeure la prise en charge précoce, la prévention et la mise en place d’une approche thérapeutique personnalisée. Chaque femme doit pouvoir continuer sa pratique sportive, qu’elle soit amateur ou de haut niveau, sans renoncer à son confort ni à sa qualité de vie.

Briser le silence autour de l’incontinence urinaire chez la femme, c’est reconnaître que la performance ne se limite pas à la force musculaire : elle passe aussi par la connaissance de son corps, la préservation de sa santé, et le courage de parler de ce qui, longtemps, a été tu.

1. Kruger JA, Dietz HP, Murphy BA. Pelvic floor function in elite nulliparous athletes. Ultrasound Obstet Gynecol 2007;30(1):81-5.
2. Moser H, Leitner M, Baeyens JP, Radlinger L. Pelvic floor muscle activity during impact activities in continent and incontinent women: A systematic review. Int Urogynecol J 2018;29(2):179-96.
3. Nygaard IE, Thompson FL, Svengalis SL, Albrigh JP. Urinary incontinence in elite nulliparous athletes. Obstet Gynecol 1994;84(2):183-7.

Pour plus d’informations et d’outils d’auto-évaluation, les sportives peuvent également consulter les ressources de la Société Française d’Urologie (www.urofrance.org).

 

Derniers articles